Située en contrebas du Morne Rouge, l’Anse à Gilot, tout le monde le sait à Terre-de-Haut, est depuis toujours le réceptacle naturel obligé de tout ce qui flotte librement dans la baie des Saintes, depuis le pied du Fort Napoléon au Mouillage, jusqu’à cette plage extrême du Fond-Curé. Nos petits voiliers miniatures d’autrefois, échappés à notre vigilance de skippers-amateurs inexpérimentés, se récupéraient immanquablement, à notre grand soulagement, sous le morne de la TSF. Les courants n’ayant pas changé, il n’est donc pas étonnant que tout un amoncellement de détritus de toute nature, se retrouve ainsi agglutiné au sable jusqu’à la limite de l’enclos des propriétés privées bordant le rivage. Ajouté à cela l’incivisme et le laisser-aller congénital de certains de nos compatriotes, on ne s’étonnera pas que l’Anse à Gilot devienne ou soit périodiquement – pour ne pas dire en permanence – une poubelle immonde, un dépotoir grandeur nature à ciel ouvert, comme l’indique le titre de cette chronique.

Lors d’un précédent billet consacré à l’Anse à Gilot, daté du 31 juillet 2013, sur la base d’un sévère rapport de l‘ARS, nous avions alerté nos lecteurs sur la qualité bactériologique extrêmement dégradée – voire dangereuse – des eaux de baignade de ce site. Aujourd’hui, rien n’a changé sinon en pire. Puisqu’à côté de la présence toujours active des Escherichia Coli, Streptocoques fécaux et autres très poétiques Staphylocoques, on trouve pêle-mêle une quantité toujours croissante de polluants plastiques (bouteilles, emballages, sachets, bidons, bâches…), de vieux cordages impossibles à dégager du sable, de palettes enfouies, de branches mortes, de palmes et noix de coco desséchées, entre autres flottants échoués par la marée et qui rendent l’accès au site quasiment impraticable. (Ci dessous le lien pour la chronique du 31 juillet 2013).
https://raymondjoyeux.com/2013/07/31/lanse-a-gillot-a-terre-de-haut-la-plage-la-plus-polluee-de-guadeloupe/

C’est ce que nous avons malheureusement constaté ce samedi 4 décembre 2021 au matin quand, à l’appel d’une association locale et du club de plongée Pisquette, nous nous sommes rendus à l’Anse à Gilot pour un nettoyage programmé de la plage et des fonds marins limitrophes. Inutile de dire que la foule était loin d’être au rendez-vous puisque nous nous sommes retrouvés, plongeurs compris, à moins d’une dizaine de personnes – presque toujours les mêmes dont une jeune polonaise – pour ce qui devait être « un grand nettoyage ». Sans matériel approprié ni service technique communal, pourtant prévu par la mairie, c’est, pour la plupart, à mains nues que nous avons rempli quelque dix grands sacs poubelle, nous contentant de ne ramasser que les objets en plastique, les restes de cordage, de filets et de bâches en décomposition. C’est dire que le travail est loin d’être achevé, même si les plongeurs plus que méritants ont ramené du fond nombre de tôles coupantes, batteries, pneus, entre autres détritus, inconsidérément jetés à la mer comme dans la gueule béante d’un vulgaire dépotoir !


Quelles conclusions tirer de ce rendez-vous manqué et de la situation toujours alarmante en matière de propreté et de salubrité publique de ce site de l’Anse à Gilot ? D’abord, selon nous, que certains riverains ne semblent pas faire beaucoup d’efforts pour maintenir praticable leur environnement immédiat. Ensuite et surtout que la population, dans son ensemble, se sent très peu impliquée quand il s’agit de donner à notre île une figure plus attrayante, plus propre, plus belle. Nous l’avions déjà observé lors des précédents nettoyages auxquels ne participent que très peu de locaux. Enfin, que malgré toutes les actions quotidiennement engagées par la municipalité pour améliorer la situation dans le bourg qui, il faut le souligner, présente un visage beaucoup plus attrayant et propre qu’auparavant, il reste à l’évidence des points noirs dans la gestion de l’environnement communal. Celui entre autres, de ne pas obliger systématiquement les responsables de dépôts sauvages à éliminer leurs déchets comme ceux de l’ancien chantier naval de l’Anse à Gilot. Que font en effet au pied du Morne Rouge cet amas de canots éventrés, ces vieux filets troués qui ne servent plus qu’à attirer vermines et rats, ce rail de halage abandonné qui dénature et rend dangereuse cette partie de la plage ?



Certes, nous savons que, s’il est facile de donner leçons et conseils, il est plus difficile de faire bouger les choses face à l’indifférence et l’inertie ancrées dans les mœurs ancestrales. Et que c’est seulement lorsqu’une majorité de la population – faisant abstraction de ses préférences politiques – prendra conscience de l’importance environnementale pour elle-même et pour la communauté que peut-être un semblant de changement en ce domaine s’opérera à Terre-de-Haut comme ailleurs. Espérons, pour le bien de tous, que cette prise de conscience ne tarde pas trop à émerger chez nos compatriotes saintois et plus généralement guadeloupéens. Car, faut-il le rappeler, nous naviguons tous sur le même ô combien merveilleux mais très fragile archipel.
Texte et photos Raymond Joyeux
Publié le 6 décembre 2021
Merci pour ce cri d’alerte, on ne peut que partager le constat. J’en profite pour signaler une autre « anomalie » située au dessus de Crawen : une sorte de décharge sauvage où brûlent en permanence des végétaux et où sont déversés des gravats (issus de démolitions) qui atteignent désormais le chemin d’accès à Crawen et auxquels se mêlent, bouteilles et plastics divers. Il semble qu’il s’agisse d’un terrain privé, pour autant les nuisances sont belles et bien publiques; on le sentiment glaçant que plus de 10 ans après la fermeture de la décharge du Chameau, apparait une nouvelle décharge à ciel ouvert juste, ce, à côté d’un des sites remarquables de l’île….
Bravo aux nettoyeurs de samedi, nous étions malheureusement absents de Terre-de-Haut mais sommes évidemment mobilisés pour ces actions…
Nous avons la chance d’avoir une si belle île, même si mon éloignement et mes activités professionnelles ne me permettent pas d’en profiter comme j’en ai toujours eu l’immense envie.
A te lire, je me souviens !
Comme il est dommage que ce précieux bout d’île ne puisse faire l’admiration de toutes et tous se prenant par la main pour l’assainir et l’entretenir comme il le mérite.
J’espère mon cher Raymond que ta chronique sera non seulement lue, ton message sous jacent, entendu, mais aussi, que ton appel, ton « SOS ANSE A GILOT » fera l’objet d’une prise de conscience du plus grand nombre créant un collectif pour se consacrer à sa beauté et à son entretien regulier Bon courage et félicitations pour tout ce travail d’alerte, si nécessaire.
Mon cher Bernard,
Je te remercie pour tes commentaires toujours positifs et pertinents. Malgré mon relatif pessimisme sur le sujet qui nous intéresse aujourd’hui, et un constat parfois désastreux comme pour l’Anse à Gilot, il faut reconnaître que des efforts sont faits ici et là pour améliorer notre petit cadre de vie. Je l’ai signalé dans ma présente chronique, le bourg de Terre-de-Haut offre par exemple aujourd’hui un visage beaucoup plus agréable qu’il y a quelques mois. Du fait de la volonté d’un conseil municipal attentif, c’est vrai, au problème mais aussi grâce à une prise de conscience – encore trop modeste – de certains de nos compatriotes sensibles au respect de l’environnement et qui chaque jour apportent leur contribution en nettoyant et en embellissant par exemple le bout de plage ou l’espace public devant et autour de chez eux. C’est mon cas, je le dis sans fausse modestie, mais pas seulement. Bien entendu, il y aura toujours des récalcitrants qui considèrent que tout est à faire par « la commune », estimant que ce n’est pas à eux à « faire le ménage » ! Et lorsque « la politique » au mauvais sens saintois s’en mêle, aucun progrès n’est à attendre de ce côté. Qu’importe ! Si ceux qui s’impliquent persistent dans leur attitude positive, peut-être qu’un jour les mentalités finiront par changer et l’on verra le mot « commune » prendre son vrai sens dans les esprits. C’est en tout cas ce que beaucoup d’entre nous espérons de toutes nos forces. Toi, moi et quelques autres, heureusement, nous sommes de ceux-là.
Bien cordialement.
Raymond
bravo à vous. très belle initiative.
Il y a tellement de choses à faire pour rendre Terre-de-Haut plus agréable à vivre. La page facebook de la mairie invitait les Saintois à participer à ce ramassage et indiquait que des agents municipaux participeraient aussi.
si les enfants des écoles saintoises mettaient la main à la pâte , peut-être que la honte aidant, les parents s’y mettraient aussi?