Terre-de-Haut : 3ème prix 2019 du Village préféré des Français

Une chanson impertinente mais… de circonstance

G. Brassens – Ph Télé Star

N’en déplaise à Georges Brassens, l’un de mes interprètes favoris, qui chantait ironiquement en 1972 la ballade des gens qui sont nés quelque part, il faut reconnaître que les Saintois dans leur globalité aiment et apprécient leur île natale. Et j’avoue que sans être chauvin je suis de ceux-là. Sachant pourtant, me semble-t-il, faire la part des choses en ce domaine, pour avoir eu et ayant encore le privilège de beaucoup voyager et de visiter nombre de « petits villages » français et étrangers autrement mieux lotis que nous en matière de services proposés, de calme, de mise en valeur des sites environnementaux, historiques et patrimoniaux : fleurissement, propreté, entretien… Aussi, à l’instar de mes compatriotes insulaires, le troisième prix des villages préférés des Français décerné à Terre-de-Haut le 26 juin dernier ne m’a pas laissé indifférent :

C’est vrai qu’ils sont plaisants tous ces petits villages
Tous ces bourgs, ces hameaux, ces lieux-dits, ces cités
Avec leurs châteaux forts, leurs églises, leurs plages
Ils n’ont qu’un seul point faible et c’est être habités
Et c’est être habités par des gens qui regardent
Le reste avec mépris du haut de leurs remparts
La race des chauvins, des porteurs de cocardes
Les imbéciles heureux qui sont nés quelque part
Les imbéciles heureux qui sont nés quelque part…

Paroles de Georges Brassens – Source : Musixmatch

Fierté, remerciements et encouragements officiels

À quelques nuances près, je ne peux que rejoindre le sentiment du maire Louly Bonbon exprimé dans le texte qu’il a publié à cette ocasion et que j’ai découvert dans ma boîte aux lettres à mon retour justement d’un fructueux périple en Espagne, le merveilleux pays entre autres de Pedro Almodovar, de Don Quichotte, de Cervantes et de Garcia Lorca. Pour ceux qui ne l’auraient pas lu, voici ci-dessous l’intégralité du texte de Louly Bonbon scanné à leur intention :

Village préféré

Village préféré… mais pourquoi pas le plus beau ?

Pour certains, sans doute du nombre de ceux dont parle ironiquement Brassens dans la conclusion de sa chanson, il n’y a aucune hésitation possible : Terre-de-Haut n’a pas à se contenter d’être le 3ème village préféré des Français. Selon eux, elle vaut bien mieux que cela !  C’est à leurs yeux non pas le village, mais le pays le plus beau non seulement de France, mais du monde et pour tout dire, de l’univers ! Pour ma part, – et pour beaucoup d’autres, j’imagine – je n’irai pas jusque là. Tout simplement parce que, selon moi, la beauté dont il est ici question ne se réduit pas à la seule configuration naturelle, si parfaite et exceptionnelle soit-elle. Elle est la résultante de nombreux autres critères auxquels notre commune est, à l’évidence, malheureusement très loin de satisfaire. Et si je rejoins Louly Bonbon lorsqu’il encourage la population « à prendre soin quotidiennement de notre espace, à l’embellir sans cesse et aussi à faire prendre conscience, notamment à nos jeunes, de la chance qu’ils ont de vivre dans un territoire aussi exceptionnel », je m‘interroge sur ce que les instances dirigeantes des générations précédentes ont laissé de positif à ces jeunes et plus globalement à la population actuelle. Principalement en matière d’aménagement collectif, de protection environnementale, de services publics efficaces, d’éducation civique, d’esprit de solidarité, de convivialité, de discipline, de respect mutuel, et bien entendu dans le domaine toujours sacrifié du culturel… autant de facteurs matériels et moraux qui contribuent non seulement à optimiser le cadre de vie, donc sa beauté naturelle, mais plus encore à améliorer les rapports humains jamais suffisamment policés. 

Un mauvais exemple parmi d’autres

Sans constamment revenir sur les questions récurrentes des embarras de la circulation, de la pollution et du traitement des déchets qui obèrent toute volonté publique et individuelle de lutter contre les dégradations incommodantes, la photo ci-dessous illustre, selon nous, cette absence de discipline précédemment évoquée. Ces immondices en plein bourg, entre deux maisons, au milieu d’un  passage très fréquenté menant à la plage du Fond Curé se sont progressivement accumulés, semble-t-il, durant plus d’un mois, sans que personne s’en préoccupe – et ce n’est qu’un exemple parmi d’autres – ; occasionnant au surplus le dépôt anarchique d’autres déchets, alimentant ainsi l’importance du tas initial, pour la plus grande satisfaction des riverains, on l’imagine, qui pourtant s’échinent, lorsqu’ils sont présents, à rendre et à maintenir cet endroit propre et parfaitement accessible à tout un chacun ! Village préféré des Français, OK. Mais-est-ce le plus propre et le mieux entretenu du monde ?

20190901_141536 (2)

Photo Raymond Joyeux – 1er septembre 2019

Réalités et désillusions

Ce titre est celui que j’avais donné à une longue analyse de la situation de Terre-de-Haut à la veille des élections municipales de mars 1989, espérant modestement faire prendre conscience à la population saintoise de ce qu’il nous reste à réaliser pour améliorer notre cadre de vie et nos relations humaines. Cette analyse commençait ainsi :

 » Lorsqu’on arrive à Terre-de-Haut par bateau ou en avion, ce qui frappe d’abord c’est la beauté, la douceur et l’harmonie du site. Le paysage, symphonie de vert, d’ocre et de bleu, vibrant de la lumière particulière des Tropiques, semble avoir été conçu et ciselé par un architecte de génie. Hormis la piste d’atterrissage et le terre-plein de Petite Anse qui sont l’imbécile et malheureux tribut de la collectivité au mythe trompeur du progrès, chaque élément de l’archipel est taillé à la mesure de l’homme. Plaisir des sens, plaisir du cœur, plaisir de l’âme : tout contribue ici à l’élévation, à l’équilibre, à la musique intérieure. Et le Saintois qui répugne à quitter ce cadre unique de sa naissance et de sa vie, s’il n’en fait pas perpétuellement état, a conscience de son privilège… Mais l’impression n’est pas la même lorsqu’on entre plus avant dans le pays. Ce qu’on était en droit d’attendre des hommes comme un prolongement à la prodigalité de la nature fait cruellement défaut et le contraste est flagrant entre la perfection du décor et l’indigence des aménagements collectifs… » (1)

1 – À l’époque de ce texte (février 1989) la place du Plan d’eau, devenue Place des Héros, n’étant pas encore aménagée servait de dépotoir. L’aérodrome, un moment en activité, n’est plus fréquenté aujourd’hui que par de petits avion-écoles et l’hélicoptère d’évacuation sanitaire.

Baie du Fond Curé au lever du jour – Photo Raymond Joyeux

Trente ans après ce constat, le paysage étant resté le même, on peut se demander si dans  les domaines des aménagements publics du bourg et des plages, de la création d’espaces verts urbains, de l’entretien des routes, de la circulation motorisée, de la maitrise du traitement des eaux usées et des déchets, de la salubrité publique, et dans tant et tant d’autres secteurs, la situation s’est substantiellement améliorée et si d’autres problèmes ne se sont pas ajoutés à ceux existants.  Je laisse à chacun le soin et la liberté de répondre.

Les raisons d’un choix

« Même si nous n’avons pas gagné, écrit Louly Bonbon, ce classement constitue un très beau résultat qui nous honore tous. » Certes. Et celles et ceux, qui chez nous comme en Métropole, ont hissé Terre-de-Haut à cette brillante troisième place, n’ont pas manqué d’arguments objectifs pour étayer leur choix : paysages idylliques, harmonie des formes naturelles, limpidité des eaux, sécurité des plages et des sentiers pédestres, calme relatif, accueil ensoleillé de la population, ambiance festive et totale liberté de déplacement, gastronomie et j’en passe… tout ce qu’il faut en définitive  pour une existence paisible et un dépaysement assuré, loin des tracas de l’ultra-modernisme et du stress des agglomérations trépidantes. Mais, car il y a un mais, soyons lucides et réalistes : il nous reste encore, c’est une évidence, beaucoup à entreprendre pour égaler, humainement et structurellement parlant, ces nombreux villages de France et de Navarre qui, sans avoir concouru à ce challenge, méritaient autant sinon plus que nous d’être labellisés. Comme le furent les deux communes qui nous ont devancés, Saint-Vaast-la-Hougue en Normandie et Pont-Croix en Bretagne, respectivement 1er et 2ème prix… et que nous félicitons pour leur nomination amplement méritée.

Saint- Vaast-la-Hougue, premier prix des villages préférés 2019 – Ph. ihacom.ca

Recommandations concernant les illustrations :
les photos personnelles de l’auteur sont libres de droit. Elles peuvent être utilisées en mentionnant simplement son nom. Pour les autres, la référence  (nom d’auteur ou du site) est obligatoire en cas de reprise non commerciale des clichés. Sinon, une autorisation des auteurs est nécessaire. Merci de respecter ces principes.

Raymond Joyeux

Cet article a été publié dans Actualités saintoises. Ajoutez ce permalien à vos favoris.

6 commentaires pour Terre-de-Haut : 3ème prix 2019 du Village préféré des Français

  1. alain thouret dit :

    Salut Raymond, pour moi TERRE DE HAUT est et reste magnifique malgré tout ces problèmes que tu cites avec raison. Puisse cette troisième place interpeller enfin les saintois indisciplinés. J’ai passé une nuit pour les fêtes de fin d’année dans un village qui fut lauréat en 2016, Rochefort en Terre. Les illuminations de Noël y sont formidables….
    A bientôt , en novembre, si dieu veut comme vous dites !

  2. raymondjoyeux dit :

    Bonjour Alain et merci pour ton commentaire. J’espère que toute la famille va bien. On se verra, j’espère en novembre. J’apprécie ta fidélité à Terre-de-Haut ! Bonne journée.

  3. Dario dit :

    Bonjour Raymond, j’ajouterai un autre site qui a été aussi une aberration du progrès de l’époque c’est la destruction du lagon de Marigot. Quand j’étais en 3eme j’avais rédigé une rédaction sur le sujet et surtout la façon dont chaque enfant du marigot avait vécu ce ravage écologique. Nous aimions chasser des oiseaux migrateurs , des crevettes et des crabes durant l’hivernage. Mais c’était surtout un tremplin pour recevoir les eaux pluviales et ainsi éviter les inondations que l’on observe aujourd’hui.

    • raymondjoyeux dit :

      Bonjour Dario, bienvenue à nouveau sur ce blog. Bien entendu, en relevant ce passage de mon article d’alors (1989) j’ai pensé au Marigot. À l’époque, la municipalité était en pourparler avec un opérateur pour un assainissement qui tardait à venir. (Bcp d’argent public a été dépensé alors pour rien…) Si bien que le site a longtemps servi de dépotoir. Lorsqu’il a été question d’y construire le collège, toutes les commissions consultées avaient donné un avis négatif pour risque de solifluxion en cas de séisme majeur. La commune a passé outre. Aujourd’hui, un lotissement a fleuri. Je possède une carte postale en couleur de l’époque où le marigot non encore investi par les projets, assurait sa fonction de réservoir, régulateur des eaux fluviales, comme tu le précises. Le site donc initial que tu as si bien connu. Je t’enverrai par mail cette carte postale. Amitié.

  4. Dario dit :

    J’attends avec impatience ta carte. Ma grand mère maternelle a aussi connu le temps ou ce lagon fournissait du sel marin lors du carême. Elle avait personnellement collecté du sel d’une grande qualité

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s