Guerre de 1914-18 : treize soldats saintois morts pour la France

Des noms surgis de l’ombre

Terre-de-Haut étant une des seules et rares communes de France à ne pas posséder de monument aux morts honorant les soldats tombés au cours des deux dernières guerres mondiales, on aurait pu croire que tous les appelés ou engagés de ce lointain territoire avaient par bonheur échappé au sort cruel des millions de jeunes et moins jeunes français et étrangers, toutes origines confondues, morts au combat pour notre liberté… Jusqu’au jour où nous nous sommes rappelé les noms de Masséna Desbonnes et de Cyprien Samson, dont la municipalité vient à juste titre, le 15 août dernier, de célébrer le courage en inaugurant à leur nom la Place des Héros.

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Des critiques inappropriées

Certains, sans aucun respect pour la mémoire et le sacrifice de ces deux valeureux compatriotes, victimes de leur engagement et de la barbarie nazie, ont cru bon, dans un tract courageusement anonyme, d’ironiser sur cette appellation et le choix de la municipalité. Arguant ridiculement du fait que, selon eux, « cette place n’avait de héros que ses joueurs de pétanque et que jamais ni Masséna Desbonnes ni Cyprien Samson n’en avaient foulé le sol » Que dire alors de la Place de la mairie rebaptisée place Hazier du Buisson, et de celle du débarcadère place du Gouverneur du Lion ? Quel rapport ces deux personnages, pour historiques qu’ils soient, ont-ils avec les lieux qui portent leur nom ?

Cyprien Samson, le jour de son arrestation par les Allemands

Masséna Desbonnes à gauche en compagnie de Raphael Cassin

Une publication du Conseil départemental

Mais trêve de polémique. Le sujet est trop grave pour s’arrêter à d’aussi viles et honteuses considérations dictées par la bêtise, le manque d’honneur et de dignité. Polémique d’autant plus stérile que le service éducatif du Conseil général vient de publier des extraits des archives départementales mentionnant, commune par commune, le nom de tous les soldats guadeloupéens morts pour la France au cours de la Guerre de 1914-18. Liste dans laquelle figurent les noms de treize de nos compatriotes saintois, cinq pour Terre-de-Haut, huit pour Terre-de-Bas.

Pour voir la liste des morts de toutes les communes, cliquer sur le lien suivant,
2ème ressource :

https://pedagogie.ac-guadeloupe.fr/histoire_et_geographie/ressources_pour_preparer_commemoration_11_novembre_2018

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Soldats antillais arrivant à Pau en 1917 – Photo Archives départementales

Nos Morts pour la France


Le tribut saintois à la guerre

Ainsi, à notre grande et triste surprise, balayant une idée reçue, nous découvrons que les Saintes ont, elles aussi, payé à leur mesure un lourd tribut à ce premier conflit mondial, et que le souvenir de ces héros aux noms bien connus chez nous, mérite lui aussi d’être honoré. De quelle façon ? ce n’est bien entendu pas à nous d’en décider. Mais sachons qu’à Terre-de-Bas, les autorités municipales n’ont pas attendu cette publication du Conseil général pour ériger une modeste et simple stèle où sont gravés les noms et prénoms des intéressés. Particulièrement bien entretenue, cette stèle se situe dans un enclos fleuri à proximité de la place de la mairie de Petites Anses.

Monuments aux morts de la Guerre 14-18 – Photo Raymond Joyeux

Aux Saintes : un anniversaire sans commémoration officielle

Renseignements pris, il s’avère que ni la municipalité de Terre-de-Bas, ni celle de Terre-de-Haut n’ont commémoré le centenaire de l’armistice du 11 novembre 1918. Ainsi, dans nos deux communes saintoises, cet important anniversaire a été purement et simplement passé sous silence et occulté. Certes les maires et conseillers municipaux ont reçu par mail à cette occasion un message du Président de la République et le nom des trois soldats français qui ont perdu la vie en cette année 2018, mais il est pour le moins regrettable qu’aucune cérémonie, si modeste soit-elle, n’ait été programmée aux Saintes, ni d’un côté ni de l’autre. Sans doute l’an prochain, à Terre-de-Haut, puisque nous connaissons désormais leurs noms, nos cinq compatriotes morts pour la France lors de la Grande Guerre, seront honorés comme il se doit pour que personne dans cette commune n’oublie leur sacrifice

Un impérieux devoir de mémoire

Sans être ni militariste ni nationaliste, on peut légitimement estimer qu’honorer à certaines occasions ceux qui se sont sacrifiés pour notre liberté est en effet un devoir collectif de mémoire qu’il faut respecter et accomplir. Devoir de mémoire auquel nous a conviés, par les mots qui suivent, le Président de la République, à la fin de son discours de l’Arc de Triomphe le 18 novembre dernier : « Sur ce sol de France, le monde entier était venu combattre. Des jeunes hommes de toutes les provinces et de l’outre-mer, des jeunes hommes venus d’Afrique, du Pacifique, des Amériques et d’Asie sont venus mourir loin de leur famille dans des villages dont ils ne connaissaient pas même le nom… Souvenons-nous ! N’oublions pas ! Car le souvenir de ces sacrifices nous exhorte à être dignes de ceux qui sont morts pour nous, pour que nous puissions vivre libres ! »

Nov. 11, 2018. (Ludovic Marin/Pool Photo via AP)

Raymond Joyeux

 

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8 commentaires pour Guerre de 1914-18 : treize soldats saintois morts pour la France

  1. Liliane CORBIN dit :

    « Je plaide notamment pour que l’on se penche davantage sur le sort des civils dans la Première Guerre Mondiale. Arrêtons de commémorer les soldats ! Je provoque en disant cela, certes. Mais après tout oui, commémorons aussi les femmes et les enfants qui ont perdu un proche au combat, ceux qui ont contribué à l’effort de guerre à l’arrière, ceux qui au contraire vivaient près du front militaire ou encore les habitants de régions entières qui ont été occupées dans le nord ou l’est de la France… Associer les civils à la commémoration du 11 novembre nous donnerait une vision nouvelle de ce conflit et du siècle qu’il a ouvert. » (Annette Becker, professeure à l’Université Paris Ouest Nanterre la Défense, spécialiste de la Première guerre mondiale.)
    Qu’en pensez-vous, Raymond ?

    • raymondjoyeux dit :

      Comment ne pas être d’accord, Liliane, avec Annette Becker, auteur du livre Oubliés de la Grande Guerre ? Il est évident qu’autant que les combattants des tranchées, envoyés à la boucherie – des deux côtés des belligérants et leurs alliés – les populations civiles ont souffert pendant et après ces conflits dévastateurs. Leur rendre hommage en les associant à celui des soldats ne serait que justice. Mais comment faire pour cela ? Toute la question est là. C’est facile lorsque des noms sont inscrits sur un monument, plus difficile à mon avis pour des anonymes… Peut-être qu’Annette Becker propose-t-elle des solutions dans son livre… que nos gouvernants sont censés avoir lu !

  2. Dario dit :

    Bonjour Raymond, je suis surpris de ton article j’étais persuadé que les Saintois vivaient sans mémoire !!! Humour noir !!! C’est formidable d’avoir pensé à ces saintois qui sont partis pour défendre leur vision de la France. Je voudrais juste souligner que mon arrière Grand Père  » Paulin Edouard SAMSON » qui habitait à coté de l’église a lui aussi combattu durant cette guerre et sur le front de Verdun. Ma grand-mère « Thérèse SAMSON » nous a raconté qu’elle recevait des lettres du front de son père et qu’elle faisait la lecture à sa mère qui se mettait à pleurer. J’imagine la tristesse dans leur foyer à chaque lettre que le facteur lui remettait. C’est vrai qu’il est rentré du front mais dans quel état psychologique ? Jamais notre Grand-mère n’en a fait allusion du retour, elle était déjà très heureuse de revoir son père.
    Tous les Saintois devraient se mémoriser ces « Vaillants Hommes » qui ont défendu leur Vision de la France.
    Ceux qui critiquent le choix de la « Place des Héros » ont-ils leur place aux Saintes ????

    • raymondjoyeux dit :

      Bonjour Dario, et merci pour ton commentaire. Pourrais-tu me donner la date de naissance de ton arrière grand-père Paulin Edouard Samson ? Je pourrais trouver éventuellement sur le net ses papiers militaires de l’époque. Cela pourrait faire une belle chronique sur notre histoire saintoise. Merci d’avance. Cordialement.

  3. Alain Thouret dit :

    Bonjour Raymond, merci pour cet article. Tout ces combattants (et civils bien sûr, car effectivement on ne parle pas assez des dommages collatéraux) qui ont sacrifié quelques belles années qui leur restaient, méritent qu’on ne les oublie pas. D’ailleurs le meilleur moyen pour que l’histoire ne se répète pas c’est de ne pas oublier.
    J’en profite pour te signaler que les tombes des marins à Terre de Haut sont de nouveau à l’ abandon. Je l’avais signalé à qui de droit et le nécessaire avait été fait…malheureusement ces marins retombent dans l’oubli.
    Comme tu le sais j’ai été 20 ans dans les sous-marin, et tout comme toi je ne suis surtout pas nationaliste. Mais on aura toujours besoin d’une armée, pas pour faire la guerre mais pour préserver la paix. Je pense à nos gars qui luttent contre des monstres qui voudraient détruire notre culture. On le remercie lorsque qu’ils y laissent la vie, puis on oublie leurs épouses, enfants et famille qui sont à tout jamais blessés.
    Quand je vois des enfants jouer ensemble, courir après un ballon, crier leur joie et leur insouciance,
    un sourire illuminant leur visage, c’est à tout ces disparus que je pense, ceux de 14, de 39,d’aujourd’hui .
    On leur doit ces moments de bonheur et de paix.

  4. Deher samya dit :

    Masséna desbonnes frère de mon grand-père Siméon desbonnes née de André desbonnes qui est mon grand-oncle vu qu’il était le frère de ma grand-père est mort le jour de l’Armistice il a refusé de se rendre il a été tué sur une place dent en a donné son nom

  5. raymondjoyeux dit :

    Bonjour Samya. Concernant la date de la mort de Masséna, le frère de ton grand-père, tu te trompes de peu. IL a été tué à l’âge de 23 ans, le 25 avril 1945, soit 14 jours avant l’armistice qui a été signé le 8 mai. C’est en tout cas ce qui est porté sur la plaque fixée sur sa tombe au cimetière de Terre-de-Haut. Cordialement.

  6. Dario dit :

    Bonjour Raymond
    ci-joint date de naissance de mon arrière Grand père

    Paulin Edouard SAMSON
    •Né le 9 février 1880 à Terre de Haut
    •Charpentier de Marine
    Merci si tu peux trouver les informations et surtout le courrier, il me semble qu’à cette époque l’armée française faisait des copies (à vérifier). Quel que soit l’information que tu trouves c’est déjà un élément de mémoire

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