Une tradition retrouvée
Voilà plus de quarante ans que s’était perdue à Terre-de-Haut la traditionnelle procession de la Fête-Dieu. C’était l’époque, à la mi-juin, des maisons fleuries et décorées pour le passage du cortège religieux avec dais, ostensoir, bannières et ornements sacrés. L’époque où les pêcheurs exposaient le long des rues leurs filets piqués de pétales multicolores ; leurs casiers ornés de guirlandes et leurs canots, toutes voiles dehors, en vue de recevoir la bénédiction du Saint-Sacrement ; où les enfants habillés en anges, au pied du reposoir, jetaient des brassées de fleurs à l’approche de l’officiant et de la foule ininterrompue des fidèles dont les cantiques à la gloire de la Vierge attestaient d’une piété non dissimulée…
Tout avait bien commencé
Ce dimanche, 18 juin 2017, c’est avec le plus grand enthousiasme que la population saintoise avait retrouvé la ferveur de cette cérémonie chrétienne en renouant avec une tradition qui semblait oubliée. Prouvant s’il en était besoin que le sentiment religieux est encore bien ancré dans notre population et le catholicisme, ses rites et sa liturgie, toujours bien vivant chez nous. Tout avait commencé dans l’effervescence ce dimanche matin ensoleillé, en dépit d’une prévision météorologique des plus incertaines. Et c’est ainsi que tout au long du parcours prévu pour la procession de l’après-midi, chacun s’activait à orner sa maison, non dans un esprit de compétition, mais en y mettant tout son cœur, sa foi et son savoir-faire artistique : palmes de cocotier, fleurs de flamboyant ou de fragipane, filets de pêcheur, portraits ou statues du Sacré-Cœur ou de la Vierge, coquillages, bateaux miniatures… rien n’était trop beau pour honorer le Saint-Sacrement, avec l’espoir et la certitude d’attirer sur sa demeure et ses occupants les faveurs du ciel, de la Sainte Vierge et de Dieu le Père lui-même dont c’était la fête…
Et la pluie arriva…
À 17 heures, sous la conduite et l’impulsion du Père Luigi, en chasuble blanche sous son dais, portant l’ostensoir et la grande hostie consacrée, entouré de la chorale paroissiale, des enfants de chœur en habit de cérémonie, précédé des petits anges ailés en robes immaculées, des hommes portant bannières, encensoir et bénitier, et suivi des fidèles en grand nombre, le cortège s’ébranle, confiant, du parvis de l’église. Le ciel menaçant ne peut que devenir clément en cet après-midi de la Fête-Dieu. C’est en tous cas ce que souhaitent et croient tous les participants à cette tradition joyeusement retrouvée de la procession du Saint-Sacrement.
Malheureusement, la météo n’a que faire de la foi du charbonnier. Et c’est un déluge impressionnant que le ciel délirant déverse imperturbable sur les Saintes. Déluge et bourrasques réunis qui obligent tout le monde à trouver un abri au plus vite, malgré la protection dérisoire des parapluies que les rafales retournent, ballottent en tous sens et rendent inefficaces. Bien entendu, le cortège s’arrête au tiers de son parcours et, hélas, ne repartira plus. Pluie, vent, branches et feuilles qui s’envolent mettent fin à la procession à peine commencée. La foule, trempée, désemparée par le réveil brutal des éléments, attend courageuse l’éclaircie espérée, puis progressivement s’éparpille en silence… Et toutes les décorations, si amoureusement élaborées, soufflées en un instant par l’onde tropicale, finissent dans les rues, emportées par la bourrasque et l’eau ininterrompue qui n’en finit pas de tomber !.. Avec du travail supplémentaire en perspective pour nos sympathiques employés municipaux déjà si généreusement sollicités !
Un mal pour un bien !
Bien entendu, même si chacun, transi, regagne ses pénates sans un mot, la déception est immense. Toute cette préparation de l’âme, ce travail méticuleux de décoration, ce soin dans l’habillement, cette ambiance religieuse et festive entretenue depuis des jours, malencontreusement interrompus, n’auront-ils donc servi à rien ?
Servi à rien ? Non. C’est en tous cas ce que pensent beaucoup malgré la déception, et que dira certainement le Père Luigi à son prochain sermon. Surtout lorsqu’on apprendra que le podium dressé pour servir de reposoir s’est effondré sous la bourrasque ! Imaginons que la procession était arrivée à son terme et que l’onde tropicale si mal venue n’avait débuté que lorsque les enfants de chœur, la chorale, les petits anges innocents et l’officiant s’étaient retrouvés avec l’ostensoir au milieu du reposoir. Quelle catastrophe c’aurait été ! Il suffit de voir les photos ci-dessous pour le comprendre. Dieu finalement fait bien les choses. C’est ce qui se dit après le drame évité de justesse, et qui se dira certainement dimanche prochain à l’église…
La pluie et le vent qui se sont abattus prématurément sur le cortège et sa ferveur retrouvée auront permis miraculeusement que le podium s’effondre sans qu’il y ait personne dessous. C’est sans doute cela, la foi qui sauve et vivifie. Et l’année prochaine le ciel sera certainement plus clément. La tradition retrouvée de la Fête-Dieu, espérons-le, quelles que soient les circonstances, se poursuivra avec la bonne volonté de tous et de chacun, et avec le souvenir contrarié mais pieusement accepté de cette année 2017, sans aucun sentiment de regret ou d’injustice… Car même si le vent l’emporte prématurément, rien n’est inutile pour l’âme lorsqu’il est fait avec foi, jubilation et générosité !
Salut Raymond , je n’ai vu cette manifestation qu’une fois et revois avec plaisir ces maisons décorées : c’etait merveilleux quelles que soient les croyances d’autrui sur tout en ce moment Amitiés
Merci Mr Raymond Joyeux pour ce récit si vivant et coloré plein d’humour .
C’est incroyable comme les traditions sont ancrées au cœur de la société saintoise, il suffit de mettre une petite flamme sous ce foyer ardent pour qu’il s’embrase puissamment ! En l’occurrence, la tempête tropicale a éteint ce bel incendie… Quel dommage !
Bravo Raymond ! Reportage développé avec son essentiel, Dieu n’a pas de maître, il est seul décideur malgré les magnifiques décorations de maisons pour sa fête !
Merci Raymond pour cet article, cela me rappelle mon enfance quand j’étais moi même en habit de petit ange sous le préau de l’école primaire, avec une jetée de fleur de flamboyant, la décoration des maisons pour cette fête.
Bonjour Dolly et merci pour tes commentaires si sympathiques, à toi et aux autres. Il y a une petite controverse concernant la dernière fois où cette procession a eu lieu aux Saintes. Pourrais-tu te souvenir à quelle date tu y as toi-même participé ? J’avais noté 40 ans, mais il semblerait que j’ai un peu exagéré. Merci de ta réponse. À ce jour, pour ton information, plus de 450 personnes ont visionné la chronique. C’est dire si ce genre d’événement intéresse ls gens. Bonne journée.
bonjour Raymond je peux te confirmer que cela fait bien 40 ans car sur les photos ils y avaient Aimée Samson la fille de Camille et Yvette ? maintenant Mme Sudou à l’époque des photos j’avais 5 ans, 6 ans.
Cela a été le bon temps, et encore merci, bonne journée toi.
Si j’étais croyante, je penserais peut-être que ce déluge fut un avertissement de Dieu pour les péchés non expiés des Saintois !!! Merci pour les nombreuses photos, dignes de celles d’un grand reporter.
Pour ceux qui voient la main de Dieu dans l’absence de catastrophe, il s’agit d’un miracle ! C’est comme cela que Lourdes est devenue un lieu de pèlerinage !
Merci Mr Raymond pour ce magnifique reportage; cela m ‘a fait penser à mon enfance . Habiller en petit ange et jeter des pétales de fleurs de flamboyants devant l ‘église .Un grand merci a Mm Cassin Louisanna . En espérant qu ‘ils le feront l ‘année prochaine
Dieu a vraiment perdu la tête depuis très longtemps et ne sait plus qui il est ni ce qu’il fait !…au lieu de faire laver les pieds des disciples par la petit jésus, il leur offre une douche complète avec séchage décoiffant…! fan de dieu ! pauvres saintois…!
Pas de réponse à mes mails du 8 mai et du 15 juin.Est-ce que vous allez bien, Raymond ?
Tout va bien, Liliane, rassurez-vous. Je prépare une nouvelle chronique. Merci de votre attention.
La dernière procession de la fête DIEU ne date pas de 40 ans, puisque le jour de la première communion de mon fils cadet, nous avons célébré la fête DIEU dans les rues de TERRE de HAUT le dimanche 25 juin 2000. J’étais déja catéchiste et je me souviens très bien puisque je fêtais en même temps mon anniversaire de mariage.Félicitations, Mr JOYEUX, vous avez tout dit et tout comprit. A l’année prochaine s’il plaît à DIEU.
Merci Chantal pour cette information importante. Je me suis fié, sans chercher davantage, à mes propres souvenirs. De plus j’y ai participé moi-même, enfant de chœur, à cette manifestation, comme j’y ai participé quand j’étais au collège à Blanchet. Mais tu n’es pas la seule à me dire que 40 ans c’était beaucoup trop. Nous espérons tous que cette fête se poursuivra à l’avenir, comme tu dis, s’il plaît à Dieu !
❤