Présidentielle(s)

Prendre conscience de notre inconscience

41WC-ScIDbL._SX334_BO1,204,203,200_L’acte citoyen que nous allons accomplir les dimanches 23 avril et 7 mai prochains (la veille de ces dates aux Antilles), en votant pour les élections présidentielles, conditionnera pour longtemps l’avenir de la France et des outre-mer. C’est la raison pour laquelle je vous propose cette réflexion de Pierre Rabhi publié dans son dernier livre La convergence des consciences paru aux Éditions Le Passeur en octobre 2016. Mais qui est Pierre Rabhi, me direz-vous ? C’est un philosophe agroécologiste de réputation mondiale et fondateur de nombreuses associations non gouvernementales. Il est l’auteur de plusieurs livres parmi lesquels Manifeste pour la Terre et l’Humanisme (Actes Sud 2008), Vers la sobriété heureuse (Actes Sud 2010), Éloge du génie créateur de la société civile (Actes Sud 2011) La Puissance de la modération (Hozhoni 2015). En préface de son livre, l’auteur écrit : « Plus j’avance dans la vie et plus s’affirme en moi la conviction selon laquelle il ne peut y avoir de changement de société sans un profond changement humain. Et plus je pense aussi  – c’est là une certitude –  que seule une réelle et intime convergence des consciences peut nous éviter de choir dans la fragmentation et l’abîme. Ensemble, il nous faut de toute urgence prendre « conscience de notre inconscience », de notre démesure écologique et sociale, et réagir. »

Voici le texte de Pierre Rabhi, les sous-titres et les illustrations sont de moi.

La croissance n’est pas la solution

9782755500073-T« En 2002, poussé  par des amis, j’ai entrepris de recueillir les 500 signatures nécessaires pour postuler au suffrage universel. Nous étions alors quasiment inconnus et j’imaginais que seuls quelques conseillers ou maires, en état d’ébriété, peut-être, en viendraient à nous donner subrepticement leurs voix. Avec les moyens du bord, nous avions entamé une sorte de tour de France et enchaînions les conférences. Les salles se remplissaient doucement.  Finalement, en dépit de notre manque d’expérience, de l’absence d’appareil politique et de moyens, nous sommes tout de même parvenus à recueillir quelque 184 signatures et nous avons pu présenter le programme qui est encore le mien aujourd’hui. Nous affirmions déjà que « la croissance n’est pas la solution » qu’il faut « consommer local », « se libérer de la société de surconsommation », récuser en doute « le dogme du progrès »,  » promouvoir une autre école », et « remettre le féminin au cœur du changement » et, enfin, nous appelions à saisir « le pouvoir qui est entre nos mains ». Nous prônions aussi « le respect de la vie sous toutes ses formes » et aspirions à « une insurrection des consciences ». Nous pension clairement qu’il était urgent de « remettre les pieds sur terre » et nous nous interrogions sur « la planète que nous allions laisser à nos enfants » mais aussi sur « les enfants que nous allions laisser à la planète »…

Des attentes toujours d’actualité

Cette mobilisation exceptionnelle nous a permis – exclusivement grâce à des dons individuels – de réunir les moyens financiers nécessaires à notre campagne consistant essentiellement en 23 conférences données sur tout le territoire national dans des salles toujours combles. Un climat festif et convivial, animé par les chants de Graeme Allwright, accompagnait cet élan citoyen et nous avons pu vérifier que nos exigences et attentes, qui ne figurent pas dans le registre politique conventionnel, étaient partagées par un nombre de personnes plus important que nous ne l’imaginions… Quinze ans plus tard, tous ces thèmes restent d’une totale actualité, en bonne logique ils devraient se retrouver au cœur du débat citoyen. La société civile innove, expérimente, invente abondamment de nouvelles manières d’éduquer, de cultiver ou de construire et ceci sans que la sphère politique s’y intéresse vraiment. Elle a même tendance à faire passer ces citoyens engagés et inventifs pour de doux marginaux…

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Marche pour le climat à Londres

La méchanceté érigée en doctrine politique

N’étant affilié à aucun parti et pas du tout convaincu que la claudication gauche-droite – peut-être utile ou nécessaire dans un contexte passé – soit aujourd’hui pertinente, je me suis en effet demandé ce que je pourrais faire d’utile avec ces signatures au moment même où la conjoncture nouvelle produit de l’insécurité dans l’âme des citoyens. L’anxiété engendre une demande accrue de choix sécuritaires avec la très dangereuse illusion que la méchanceté érigée en doctrine politique sera la solution à tous nos maux. Difficile d’œuvrer utilement et d’être audible dans un tel contexte et c’est, entre autres, pourquoi j’ai abandonné toute velléité électorale. Plutôt que d’investir de l’énergie dans une campagne aléatoire, je préfère en effet mettre en avant les alternatives concrètes, écologiques et humaines émanant du « génie créateur de la société civile ». Ainsi, avec l’aide de tous les amis qui m’honorent de leur confiance, pourrons-nous, ensemble, agir – par-delà tous les antagonismes stériles et meurtriers – pour ce qui est fondamental, ce qui s’inscrit dans la permanence et qui, au-delà d’une échéance politique, détermine l’avenir commun…

Construire et habiter un monde apaisé

Au-delà de l’éternel dilemme entre un pessimisme démobilisateur et un optimisme rassurant, c’est le réalisme qui doit désormais éclairer nos actes. Nous sommes tous invités à témoigner et à œuvrer pour que la vie dont l’intelligence et la beauté sont évidentes nous inspire pour construire et habiter un monde apaisé et digne de cette intelligence et de cette beauté. Nous n’avons pas d’autre choix. »

Texte de Pierre Rabhi extrait de son livre : La convergence des consciences, chapitre intitulé : Présidentielle(s)- Page 168

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Et chez nous, quel réalisme écologique pour éclairer nos actes ?

En Guadeloupe continentale, c’est un réalisme positif en tout cas qui anime ces élèves du Lycée de Massabielle de Pointe-à-Pitre partis du 17 au 26 mars en Belgique discuter environnement. Le quotidien France-Antilles du 13 mars 2017 qui rapporte le fait précise : « Outre l’action écologique, cette opération incite les jeunes à faire des efforts pour maîtriser l’anglais, langue d’échange. Elle leur permet de découvrir d’autres cultures et de partager leur culture avec les autres ». Pour lire l’intégralité du reportage cliquer sur le lien :
http://www.guadeloupe.franceantilles.fr/actualite/education/massabielle-des-lyceens-vont-discuter-environnement-en-belgique-419854.php

Une partie des déchets sortis de la mer, non loin du rivage, par R. Joyeux le 16.10.2016

Alors qu’aux Saintes et à Terre-de-Haut en particulier, en dépit d’efforts certains, souvent individuels et répétés, nous avons encore de sérieux progrès collectifs à faire sur le plan environnemental et écologique où une réalité quotidienne parfois sordide, côtoie et défigure les somptueux paysages qui font notre fierté et la réputation désormais mondiale de notre baie et de notre archipel. En ce domaine, avons-nous vraiment « conscience de notre inconscience », comme le dit Pierre Rabhi, en laissant subsister sur le littoral et ailleurs ces points noirs qui nous empoisonnent et nous interdisent de construire ensemble et d’habiter sereinement, loin de toute méchanceté et discrimination, un monde – notre petite île – apaisé et digne de l’intelligence et de la beauté de la vie qui nous environnent ?

Avoir conscience de notre inconscience : section de littoral pollué de TDH – Ph. R.Joyeux

Remerciements

En ce début d’avril 2017 et du printemps qui s’installe, je tiens à remercier chaleureusement tous les lecteurs et lectrices de ce Blog, les nombreux commentateurs, ainsi que ceux et celles qui par leurs partages permettent de multiplier le nombre de consultants, en particulier Patrick Rogers, toujours au RDV, et Terre-de-Haut Indiscrétions. C’est ainsi qu’à ce jour, l’article sur la Généalogie d’une famille saintoise, Les Lognos, plusieurs fois partagé, a été consulté 747 fois depuis sa publication le 14 mars  et généré 19 commentaires.
Merci à nouveau pour votre intérêt et un joyeux printemps à tous et à toutes. 

Raymond Joyeux 

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2 commentaires pour Présidentielle(s)

  1. Dominique dit :

    J’aime l’interrogation inversée sur « les enfants que nous allons laisser à la planète », et aussi la réflexion sur cette « croissance » absurde pourtant si vantée par économistes et politiciens.
    Merci Raymond!

  2. Liliane CORBIN dit :

    Je connais Pierre RABHI, ayant vu un reportage il y a quelques années. C’est un homme exceptionnel. Merci Raymond, pour lui avoir consacré cet article !

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