Bonjour chers lecteurs
À celles et ceux qui attendent la suite de mon voyage en Scandinavie je demande de bien vouloir m’excuser pour cette interruption indépendante de ma volonté et de patienter encore un peu. Je terminerai cette chronique d’été dans quelques jours. En attendant, voici, en cette veille de la Toussaint, l’article que j’avais publié sur le sujet fin octobre 2013. Estimant qu’il est toujours d’actualité, en dehors des dates et de la disposition des illustrations, je ne l’ai modifié en rien. J’ai aussi ajouté une photo prise cette année 2016. Ce qui me donne l’occasion de préciser que notre petit cimetière est plus coquet que jamais. Employés communaux et particuliers ont eu à cœur en effet de peaufiner entretien et embellissement. Ce qui signifie que le culte et le respect des morts restent toujours très vivaces à Terre-de-Haut et que nos disparus ne sont pas oubliés. Une pensée particulière pour tous ceux qui nous ont quittés en cette année 2016, aux Saintes ou ailleurs : parents, amis, connaissances…
La découverte du 4 novembre 1493
La période de la Toussaint devrait être pour les Saintois l’occasion de célébrer un triple événement. L’anniversaire tout d’abord de la découverte de notre Archipel par Christophe Colomb voilà 523 ans cette année 2016, la fête des Saints ensuite, la commémoration enfin de nos semblables défunts.
Si le premier de ces trois événements est généralement passé sous silence, nous n’apprendrons rien à personne en rappelant que c’est à son deuxième voyage que Christophe Colomb, parti de Cadix le 25 septembre 1493, aperçut la Désirade, après 21 jours de navigation depuis les îles Canaries ; puis Marie-Galante et la Dominique le dimanche 3 novembre 1493. Et c’est au matin du lundi 4, qu’il aperçut et baptisa notre petit Archipel Los Santos en se rapprochant de la Guadeloupe proprement dite pour y faire reposer ses équipages. Nous étions en l’octave de la Toussaint et le nom se féminisa par la suite en se francisant, d’où : Les Saintes.
La fête de tous les Saints
Quant aux deux autres événements, respectivement célébrés chaque année le 1er et le 2 novembre par les catholiques, chacun sait que ce sont deux fêtes religieuses établies par l’Église de Rome aux 8ème et 10ème siècles. La première, codifiée par le pape Grégoire IV pour honorer les Saints et Martyrs, la seconde instituée en 998 par Saint Odilon, abbé de Cluny, pour commémorer les fidèles décédés.
La célébration des morts
Si les traditions varient d’un pays à l’autre, voire d’un cimetière à l’autre, quant à la manière d’honorer les morts en rénovant et en fleurissant par exemple les tombes avec tel ou tel type de fleurs, l’usage de les illuminer, s’il n’est pas universel, n’est pas non plus l’exclusivité des Antilles et encore moins des Saintes. Dans beaucoup de pays de par le monde, la tradition de l’illumination est bien établie, comme le montre la photo ci-dessus d’un cimetière polonais un soir de premier novembre.
Le petit cimetière de Terre-de-Haut
Pour revenir aux Saintes, il faut bien se rendre à l’évidence : le petit cimetière de Terre-de-Haut autrefois renommé pour ses modestes tumulus de sable, entourés de conques de lambis, remplacées chaque année en cette période, a perdu depuis longtemps son cachet et son originalité. S’il subsiste encore quelques rares sépultures traditionnelles, typiquement saintoises, régulièrement entretenues par les familles des défunts, la quasi totalité des tombes d’aujourd’hui sont des caveaux de béton qui ne présentent en soi aucun intérêt culturel ou esthétique, même si les guides touristiques persistent abusivement à recommander une visite du lieu, pour, prétendent-ils, « son pittoresque et son caractère unique exceptionnel », ce qui reste à prouver aujourd’hui mais qui était parfaitement vrai autrefois.
Les tombes de marins
Ce qui fait néanmoins l’intérêt de ce cimetière devenu trop petit, (au point d’empiéter sur le morne voisin), mais chaque année rénové et embelli par le nettoyage, la peinture et la remise en état des tombes et des allées, c’est le fait que pas moins de 28 matelots et officiers de tout grade de la Marine nationale française y ont été inhumés entre 1838 et 1941, à une époque où les navires de guerre français faisaient escale aux Saintes et y étaient bienvenus.
En cette année 2013 (et cette année 2016 également), on ne peut que se réjouir de constater qu’un réel effort ait été accompli pour relever quelques-unes de ces tombes, désensabler les sépultures enfouies, entourer certaines de conques, repeindre les pierres tombales ou les stèles, allant même parfois, par excès de zèle, jusqu’à cacher sous la peinture blanche la marque tricolore barrant le haut de leur croix.
Un monument en leur mémoire est édifié qui porte leurs noms et l’année de leur décès. Quant aux tombes elles-mêmes de ces marins morts et enterrés aux Saintes, on peut en répertorier aujourd’hui une petite douzaine pour la plupart surmontées d’une plaque de cuivre gravée, souvent difficilement lisible, d’une croix en bois ou d’une stèle de pierre mentionnant généralement leur identité, leur qualité, leur grade, leur région d’origine parfois, la date exacte et la cause de leur décès.
En attendant que les sépultures de ces marins soient totalement réhabilitées et leurs occupants parfaitement identifiés, les photos qui suivent sont un modeste hommage rendu à leur mémoire.
Et pourquoi ne pas imaginer qu’un jour on réunisse dans un carré qui leur serait réservé les restes et les tombes éparpillées de ces militaires ? Ce serait tout à l’honneur des autorités saintoises, et Terre-de-Haut se réconcilierait ainsi avec la Marine nationale qui a tant servi l’Archipel et ses habitants par le passé. Mais peut-être aussi qu’en les laissant mêlés aux sépulcres de la population, on perpétue les liens qui les unissaient aux gens du pays. Cette idée n’est pas non plus finalement à rejeter ! À vous, lecteurs, de donner votre avis et d’exprimer vos suggestions.
R.Joyeux
Cher Monsieur,
un grand merci pour votre article en ce jour de Toussaint, et pour vos articles en général.
Pourriez vous me préciser si les séputures traditionnelles typiquement Saintoises correspondent aux tumulus entourés de conques de lambis ?
Dans l’attente de vous lire et au plaisir de vous revoir aux Saintes.
Très cordialement.
Christophe Laplace
Bonjour Monsieur Laplace,
C’est à moi de vous remercier pour votre commentaire. Pour répondre à votre question, je dirai que si les tumulus entourés de conques de lambis sont en effet les sépultures traditionnelles saintoises, il faut préciser que les Saintes n’ont pas l’exclusivité de cette tradition. Dans certaines autres communes de Guadeloupe proches de la mer et en particulier à Saint-Barth, on trouve ce type de tombes. Et certainement aussi dans d’autres îles de la Caraïbe.
Ce qui est sûr c’est qu’autrefois, à Terre-de-Haut, on enfouissait directement les cercueils des défunts (fabriqués sur place le jour du décès) dans une fosse creusée à même le sable du cimetière (celui-ci étant le prolongement de la plage de Grand’Anse). On y plantait une croix côté soleil levant, avec le nom et l’âge du défunt et on bordait le tumulus de conques, quelquefois sur plusieurs rangées en dégradé. C’est cette particularité qui a longtemps fait le charme de ce cimetière.
Il y a cependant toujours eu parmi ces simples tombes de sable décorées de lambis et fleuries de pervenches, quelques caveaux de famille en dur, formant souvent chapelle et comportant plusieurs compartiments. À mesure que la population augmentait, et par voie de conséquence le nombre de défunts, les caveaux familiaux en béton se sont progressivement substitués aux tombes individuelles. Si bien qu’il ne reste plus que de rares tombeaux traditionnels comme ceux présentés dans cette chronique,