Sa santé s’était dégradée ces dernières semaines et c’est le mercredi 7 septembre 2022, à l’âge de 84 ans, que Georges Vincent s’est éteint. Ses obsèques se sont déroulées le mardi 13 à Terre-de-Haut, en présence d’une foule considérable. Car s’il était archi connu aux Saintes, il l’était aussi en Guadeloupe continentale où il avait de la famille et de nombreux amis et connaissances.
Une enfance saintoise
Né d’un père charpentier de renom et d’une mère au foyer, mais élevé en grande partie par sa grand-mère, Mme Floresty, dans une petite maison-bistrot jouxtant l’actuel Café de la Marine, Georges Vincent a suivi sa scolarité primaire à Terre-de-Haut avant d’aller poursuivre ses études secondaires au lycée de Basse-Terre en Guadeloupe dite continentale. Inscrit dans une pension de famille, il a maintes fois raconté les vexations et moqueries qu’il subissait de la part de ses condisciples, à une époque où les jeunes Saintois expatriés étaient considérés par les Guadeloupéens comme des attardés mentaux et des déficients intellectuels. Ce qui ne l’a pas empêché d’obtenir quelques années plus tard une licence en droit à l’Institut Vizioz de Pointe-à-Pitre.
Un fonctionnaire compétent et assidu
Entré dans l’administration communale comme secrétaire adjoint en 1960, à l’âge de 22 ans, sous la mandature de Georges Azincourt qui succéda au maire Théodore Samson, mystérieusement décédé à la gendarmerie deux ans plus tôt, Georges profita d’une formation sur place en mairie, sous la houlette de M. Irénée Bonbon, secrétaire titulaire, qu’il remplaça au départ à la retraite de ce dernier, jusqu’à la date de sa propre retraite prise à 62 ans en l’an 2000, année symbolique… après 40 ans de bons et loyaux services, formule qui, en l’occurrence, concernant Georges, est une réalité, davantage en tout cas qu’une simple et banale figure de style.
Au cours de ses 40 années de fonction, désireux de se perfectionner et d’actualiser ses compétences au gré des nombreuses réformes administratives, notre ami ne manquait jamais un stage de formation et compensait ses journées d’absence par une assiduité sans faille à la mairie, travaillant du 1er janvier au 31 décembre, nous dit son cousin Jean-Léon, sans tenir compte des jours fériés et n’ayant pris qu’une seule période de congé de toute sa longue carrière.
Féru de politique, d’histoire, de littérature et de grande musique
Ceux qui, de près ou de loin, ont côtoyé notre ami Georges Vincent, ou le rencontraient inopinément dans la rue, sur une place ou dans un bar, l’ont toujours vu un journal ou un livre sous le bras. Grand lecteur, intéressé au plus haut point par la politique internationale, nationale et locale, il était imbattable sur les partis, les hommes et les combinaisons politiques. Observateur privilégié de par ses fonctions de la mentalité de ses compatriotes Saintois et des méandres de la vie politique locale, fin connaisseur des difficultés à gérer une commune où chacun ne cherche le plus souvent qu’à défendre ses seuls intérêts, il répétait à qui voulait l’entendre « qu’il vaut mieux être maire à Paris qu’à Terre-de-Haut ». Mais ce que beaucoup ignoraient et ignorent peut-être encore, c’est que Georges était aussi un mélomane averti, amateur éclairé de musique classique et admirateur des grands artistes de la chanson comme Léo Ferré, Jacques Brel, Serge Gainsbourg, Barbara… dont il connaissait les grands succès et en parlait avec enthousiasme et sincérité.
Chef d’entreprise et fêtard, impliqué dans la vie sociale et culturelle de son île
En dehors de ses fonctions à la mairie de Terre-de-Haut, Georges Vincent était un investisseur-né. Il fut le premier aux Saintes à ouvrir une agence locale d’Air Guadeloupe du temps où les avions de cette compagnie desservaient notre archipel. Puis il n’hésita pas à se lancer dans la restauration en créant avec des associés un premier établissement, Le Mouillage, puis, successivement, dans son propre immeuble le snack bar L’Escale suivi du First Food.
Activités qui ne l’empêchaient pas d’avoir une vie nocturne animée puisqu’avec des amis dont je faisais partie, nous passions jusque bien après minuit la plupart de nos soirées au Star, célèbre boîte de nuit saintoise de l’époque, tenue par l‘indomptable Marie Molza. Et c’était régulièrement chez ma mère que nous finissions nos nuits autour d’une soupe grasse ou d’un plat de poisson grillé… bien entendu, copieusement arrosés.
Ma rencontre personnelle et mon amitié avec Georges
Mais ma rencontre plus personnelle avec Georges Vincent date de l’année 1965 quand, revenu du service militaire et nommé comme enseignant à Terre-de-Haut, j’avais apporté dans mon barda l’idée et l’intention de créer le premier mensuel saintois d’informations politiques, culturelles et sportives dont j’avais déjà choisi le titre : L’ÉTRAVE.

Et c’est tout naturellement avec Georges comme directeur du périodique et rédacteur occasionnel que nous avons commencé l’aventure. Avec comme collaborateurs attitrés le docteur Yves Espiand, André Allard, directeur de l’école primaire et le docteur Nègre, féru de cuisine et d’histoire des Antilles. C’était alors ma propre petite chambre-bureau chez mes parents qui nous servait de salle de réunion où nous concevions et rédigions nos articles, comme en témoigne la photo ci-dessous. Depuis cette date, nous étions devenus plus qu’amis et le sommes restés en dépit des aléas politiques et de la vie tout court qui auraient pu nous séparer. La dernière fois que j’ai vu Georges aux Saintes, en janvier ou février dernier, c’était pour lui annoncer le décès d’Yves Espiand alors que nous avions déjà perdu nos amis Alain Dufet, Loulou Martin, Alain Foy et Robert Manicom…
Emporté par la maladie
Souffrant ces derniers mois de crises d’épilepsie, Georges Vincent a été à quatre reprises évacué par hélicoptère sanitaire depuis Terre-de-Haut, pour revenir chaque fois chez lui poursuivre sa vie de paisible retraité, apparemment sans grand problème. « Et c’est le jour où il s’est rendu de lui-même à l’hôpital, le vendredi 2 septembre 2022, pour un banal contrôle, nous informe son cousin Jean-Léon Vincent, qu’il n’est plus revenu, puisqu’il est décédé loin des Saintes, cinq jours plus tard, le mercredi 7 septembre. »
Georges Vincent restera dans la mémoire collective saintoise, en dépit de sa modestie légendaire, comme un personnage emblématique de notre commune. « Esprit vif, intelligent et cultivé, nous précise encore avec raison Jean-Léon, aimant passer son temps à lire et écouter de la musique classique, de Berlioz à Bach, adorant raconter des histoires inspirées de ses nombreuses lectures. »
À son fils Daniel à son frère Alain, à ses sœurs, à sa famille, ses proches et amis, nous présentons nos plus sincères condoléances et les assurons de notre plus profonde sympathie.
Adieu l’ami
Texte de Raymond Joyeux
Publié le 19 septembre 2022
Avec les plus vifs remerciements de l’auteur à Pierrette Procida-Garçon et à Jean-Léon Vincent, cousin de Georges, pour leurs précieuses informations et photographies.
Bonjour Raymond
George était aussi mon ami et nous nous croisions souvent à Basse Terre où nous poursuivions tous les deux des études. Évidemment c’était il y a bien longtemps.
Puis je me permettre de te demander de transmettre de ma part, à sa famille et à ses proches , mes très sincères condoléances.
A toi Raymond, mon très sincère et très amical salut. Bernard