En guise de vœux du nouvel an : vivre entre ciel et mer..

Le Muséum National d’Histoire Naturelle de Paris a organisé en 1997 une passionnante exposition sur les ÎLES. Outre des connaissances et informations insoupçonnées, nous avons ramené de notre visite de l’époque une intéressante brochure résumant en textes et illustrations les principaux thèmes de cette exposition. Nous pensons que les extraits qui suivent sont susceptibles d’intéresser nos lecteurs Saintois, Antillais et tous les iliens en général, quel que soit l’emplacement de leur île respective sur l’immensité des océans du globe.

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L’île comme nous la rêvons

Objet de science, objet de rêve, l’île renvoie des images diverses, selon qu’elle est sous le regard du géographe, du biologiste, de l’écrivain, du poète ou de tout un chacun.

Sa définition géographique, qui s’appuie sur des indicateurs essentiellement physiques, tels que sa taille ou son éloignement des autres terres, n’est déjà pas simple. Peut-on encore parler d’île, quand il s’agit par exemple du vaste continent australien ? Mais les représentations qu’elle suscite dans nos têtes sont encore plus complexes. Ce n’est pas par hasard si le thème de l’île nourrit une riche littérature depuis l’Odyssée d’Homère jusqu’à des œuvres contemporaines comme Vendredi ou les limbes du Pacifique de Michel Tournier.

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Photo Muséum National d’Histoire Naturelle

Les îles sont isolées des autres terres

La caractéristique même de l’île est son isolement, qui engendre des conditions de vie particulières. Les animaux et végétaux confrontés à ce nouveau milieu évoluent autrement que sur le continent. C’est ainsi que peuvent apparaître sur l’île, en quelques dizaines ou centaines de milliers d’années, des espèces nouvelles, présentes nulle part ailleurs. Ces espèces sont dites endémiques à l’île. Elles se distinguent, souvent de façon spectaculaire, par leur morphologie, leur écologie, leur comportement.

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Iguane délicatissima endémique de Petite Terre en Guadeloupe. Photo Raymond Joyeux

Chez les hommes, l’isolement géographique va également créer des conditions de vie nouvelles. Dans un espace restreint, éloigné du continent, les insulaires, liés aux autres peuples par des échanges plus ou moins limités, vont inventer un monde à eux, une manière d’affirmer leur différence et leur identité.

Tradition et identité saintoises – La traîne : Tableau d’Alain Joyeux

Les îles sont reliées aux autres terres

Aussi lointaines qu’elles puissent être, les îles entretiennent toutes des liens avec le continent ou d’autres terres proches. Les îles océaniques, surgies de l’eau, n’ont pu se peupler qu’à partir d’immigrants venus d’ailleurs ; les iles continentales, elles, étaient déjà habitées au moment de leur formation ; mais dans les deux cas, des relations régulières ou épisodiques s’établissent avec l’extérieur.

Différents paramètres propres à l’île, sa taille, sa proximité des autres terres, sa géologie, son climat favorisent ou limitent les échanges.
L’arrivée des espèces animales et végétales est également fonction de l’aptitude que celles-ci ont à se déplacer puis à s’implanter. Les courants océaniques et atmosphériques jouent aussi leur rôle. Dans le cas des hommes, le problème du peuplement est plus complexe, faisant intervenir des facteurs liés à leur histoire propre.

Voiliers saintois reliant autrefois l’archipel des Saintes au « continent » guadeloupéen tableau d’Alain Joyeux

N.B. Les textes ci-dessus sont extraits du catalogue de l’exposition sur les îles au Muséum d’Histoire Naturelle de Paris 1997

*****

L’homme qui aimait les îles
D.H. Lawrence
Éditions Pardès 1988

C’était un homme qui aimait les îles. Et il était né dans une île, mais elle ne faisait pas son affaire, car elle contenait beaucoup trop d’autres habitants, en dehors de lui. Il désirait une île qui fût à lui seul : non pas nécessairement pour y être seul, mais pour en faire un monde qui n’appartiendrait qu’à lui.

Une île, quand elle est assez grande, ne vaut pas mieux qu’un continent. Il faut vraiment qu’elle soit très petite pour quelle donne l’impression d’être une île ; il faut qu’elle soit minuscule pour qu’on puisse avoir la prétention de la remplir de sa seule personnalité.

Or, grâce à tout un concours de circonstances, cet amateur d’îles, lorsqu’il eut trente-cinq ans, acquit bel et bien une île à lui. Il ne la possédait pas en toute propriété, mais il avait un bail de quatre-vingt-dix-neuf ans, ce qui, lorsqu’il s’agit d’un homme et d’une île, équivaut à l’éternité. Car si vous êtes comme Abraham et si vous voulez que vos descendants soient aussi nombreux que les grains de sable du rivage, vous ne choisiriez pas une île pour vous multiplier. Bientôt elle serait surpeuplée et les habitants s’entasseraient dans des taudis. Pensée horrible pour quelqu’un qui, dans son île, aime son isolement. Non, une île est un nid qui ne contient qu’un seul œuf, un seulement. Cet œuf est l’insulaire lui-même…

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L’île au cœur de l’archipel

Raymond Joyeux – Poèmes de l’archipel
Édition Les Ateliers de la Lucarne 2018

Je suis l’île au cœur de l’archipel
De profondes racines j’alimente mes ans
Et les vents sont mon souffle et les marées mon sang
Je suis l’île au cœur de l’archipel.

Je vibre aux pulsations de la mer incessante
Au rythme irrégulier de ses mouvantes lèvres
Je module ma course et je règle mes fièvres
Je vibre aux pulsations de la mer incessante.

Les odeurs matinales emplissent mes réveils
Je les dénombre toutes et je les éparpille
Puis les forme en bouquets pour les offrir aux filles
Les odeurs matinales emplissent mes réveils.

Le soleil rétrécit l’ombre de mes paupières
Et mes veines se gonflent en désirs insoumis
Les passions rentrées se déchaînent à midi
Le soleil rétrécit l’ombre de mes paupières.

J’aime les battements et la fraîcheur des ailes
Des myriades d’oiseaux à ma cour attachées
Et le picotement de leur bec affolé
J’aime les battements et la fraîcheur des ailes.

Quand la sueur de l’amour à mon front se fait perle
Dans le chuchotement des sables de la nuit
Je m’offre en gémissant aux humides roulis
Quand la sueur de l’amour à mon front se fait perle.

Et j’égrène aux courants ma semence insulaire
Mes germes coralliens que fécondent les algues
Et que nourrit le sel amniotique des vagues
Et j’égrène aux courants ma semence insulaire.

Je suis l’île au cœur de l’archipel
De profondes racines j’alimente mes ans
Et les vents sont mon souffle et les marées mon sang
Je suis l’île au cœur de l’archipel.

L’île de Terre-de-Haut dans l’archipel des Saintes – Photo Raymond Joyeux

Remerciements pour votre fidélité
et meilleurs vœux à toutes et tous pour l’année 2022

Publié par Raymond Joyeux
le 27 décembre 2021

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6 commentaires pour En guise de vœux du nouvel an : vivre entre ciel et mer..

  1. CATHERINE SNC SEGURET VOGLIMACCI dit :

    Bravo pour vos belles chroniques, l’ouverture à la réflexion, les nécessaires retours sur le passé qui éclairent utilement le présent et …. bonne année !

  2. Samson dit :

    Superbe ce poème « Au coeur de l’Archipel ».

  3. Jean S Sahaï dit :

    Barques qui revenez…

    Vas-tu fair eun article sur le salako ?

    Amitiés de fin d’an,

    JS

  4. Haudebourg dit :

    Bonjour monsieur,
    Merci pour votre blog, vos informations, et vos créations poétiques.
    Faisant des recherches sur un jeune marin, soldat deuxième classe, issu de mon village est décédé aux saintes en 1860, à l’hôpital, je suis arrivée sur votre site.
    Il se trouve que les deux marins témoins de ce décès habitaient les saintes et s’appelaient Saturnin Joyeux ( 25 ans) et Camille Joyeux(26 ans).
    C’est avec plaisir que je vous laisse mon mail pour un échange d’informations.
    Sincères salutations,
    Brigitte Haudebourg
    (Sarthe)

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