La plage de l’Anse Figuier temporairement interdite de baignade

Quatorze jours après les prélèvements effectués par l’ARS, la Mairie de Terre-de-Haut officialise ce lundi 24 mars 2025 l’interdiction de baignade à l’Anse Figuier. Une signalisation adéquate (drapeau rouge et affichage de l’arrêté municipal N° 2025-47-AT-PM.) est prévue sur le site pour en informer le public.

Anse Figuier. Au fond le Grand-îlet. Photo Raymond Joyeux

Une station d’épuration défaillante ?

La pollution des eaux de cette plage n’étonnera personne, et nul ne sait quand cette interdiction de baignade sera levée. Il faut savoir en effet que c’est à l’Anse Figuier que se déversent les égouts de la commune de Terre-de-Haut après avoir été théoriquement traités par la petite station d’épuration située en amont, juste sur le morne qui précède la descente vers le site. La question se pose de savoir si cette pollution provient du mauvais fonctionnement de la station d’épuration ou d’une autre source.

Nettoyage de la plage de l’Anse Figuier – Décembre 2020 – Photo Raymond Joyeux

L’Anse Figuier en poésie

Sauvagine

Aux aguets
l’œil fixe hors du temps
poinçonné d’or en périscope

bottes en aigrette sur le sable
écu de bronze
ciselé d’aspérités

un spadassin en armes
étrille son domaine
à la guérite du pourpier.

N’effraie pas ce peureux magnanime
à la herse baveuse
ce traitre ocydien

délateur de pataches
racoleur de fucus
aux moires du bassin

maraudeur d’abject et de fange.

Au guichet de l’épargne
L’Anse Figuier
grignote ses actions :

Rivières d’algues délétères
mues massacrées aux tessons des coraux
ravines ensemencées de larves cédulaires.

Escortée de relents de nausées
sous l’œil de sa cavalerie

une amazone aphteuse
agonise égorgée
aux ventouses de l’actinie.

(Extrait du recueil Nautiques – 2018)



Tentative d’explication

(Clés pour Nautiques)


Cette anse, qui forme comme une échancrure ourlée à l’à-pic oriental du Chameau, doit-elle son nom à la présence ancienne d’une plantation sauvage de figuiers maudits sur ses rives ? On pourrait l’imaginer, d’autant qu’en face, sur le Grand Îlet, s’est développée, de la même essence endogène, la plus vaste cathédrale végétale existant aux Saintes et peut-être même en Guadeloupe continentale.

Mais l’Anse Figuier est également connue pour être le domaine privilégié de cet élégant petit crabe des sables appelé chevalier, toujours en alerte sur ses bottes ciselées, les yeux démesurés, hors de leur orbite, à la manière de vivants périscopes. Familier de la grasse végétation des pourpiers sur laquelle il veille comme une sentinelle aux aguets, ce petit arthropode blond caparaçonné d’or est accusé dans le poème de faire bon ménage avec le fait que ce site sauvage ait été choisi pour recevoir les effluents des égouts communaux. D’où les expressions péjoratives utilisées pour le qualifier: traitre ophidien, délateur, racoleur, maraudeur… 

Parallèlement à cette accusation à l’encontre de l’habitant naturel des lieux, le poème met en évidence les caractéristiques négatives du site aujourd’hui dénaturé par l’action inconsidérée de l’homme : un champ lexical approprié traduit à l’envi cette dénaturation : abondance d’algues générée par les nutriments déversés par les égouts : fucus, algues délétères; fange; larves cédulaires; relents de nausée… Autant de qualifiants pour suggérer la détérioration d’un milieu autrefois parfaitement sain mais aujourd’hui particulièrement pollué.

À la manière d’un épargnant incapable de faire prospérer ses acquis, l’Anse Figuier grignote ses actions. Ce qui n’empêche pas la survivance d’une certaine activité biologique puisque le poème se termine par l’agonie d’une amazone aphteuse, métaphore pour désigner le crabe chevalier à la herse baveuse *, entre les griffes souples de l’anémone de mer, l’actinie

Conclusion pessimiste et optimiste à la fois qui suggère d’une part qu’au bout du compte, sous l’effet volontaire et mortifère de l’activité humaine, toute vie finira peut-être par disparaître un jour de ce site ; d’autre part, et tout au contraire, qu’en dépit de ce qui contribue à la dégrader, la nature reprenant toujours ses droits, la vie continuera à y éclore et à s’épanouir. L’agonie du chevalier-amazone symboliserait alors à la fois la fin de la désolation et le retour des sauvagines, ces oiseaux migrateurs, porteurs d’espérance, visiteurs accoutumés des berges de l’anse qu’ils avaient désertées pour d’autres lieux plus propices à leur escale occasionnelle.

* Le crabe chevalier porte au poitrail de sa carapace une plaque triangulaire amovible sous laquelle se logent les œufs après fécondation. Au-dessus de cette plaque se situe la cavité buccale laissant échapper en permanence une légère mousse, semblable à de la bave qui coule sur l’opercule abdominal.

Un itinéraire autobiographique ou clés pour Nautiques – Raymond JoyeuxDécembre 2020

Figuier Maudit du Grand-Îlet – Photo Raymond Joyeux

Poème, texte et photos de Raymond Joyeux
Publié le jeudi 27 mars 2025

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2 Responses to La plage de l’Anse Figuier temporairement interdite de baignade

  1. Avatar de Jean S Sahaï Jean S Sahaï dit :

    Barquequi, revenez !

  2. Avatar de Jean S Sahaï Jean S Sahaï dit :

    Qué bab qui revenez ?

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