Tour de Guadeloupe en voile traditionnelle

C’est ce jeudi 3 juillet qu’a été disputé le prologue du tour de la Guadeloupe en voile traditionnelle.

À cette occasion je vous communique le reportage de Guadeloupe la 1ère sur le sujet qui donne la parole à notre compatriote Alain Foy, constructeur de saintoises, bien connu à Terre-de-Haut et dans le milieu de la voile traditionnelle guadeloupéenne.

Nous remercions l’auteur, Josiane Champion, de permettre aimablement le partage de son article daté du 2 juillet 2025.

Archives Raymond Joyeux

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.J-1 avant le Traditour 2025 : le canot saintois selon Alain Foy

22 des 39 canots qui s’aligneront sur la plage de Portsmouth, le 3 juillet, pour le départ du Traditour 2025, sont signés Alain Foy. Le constructeur, qui se veut le gardien d’un savoir-faire ancestral autour de la saintoise traditionnelle, en est à sa 61ème création. Et chaque nouveau canot issu du chantier de Terre-de-Haut comporte sa touche d’innovation.

Sur la plage de Marigot, à Terre-de-Haut, dans l’archipel des Saintes, se trouve l’atelier de charpenterie marine d’Alain Foy. Moins d’une semaine avant le départ du Traditour 2025, l’artisan terminait le ponçage d’un mât, fabriqué en quatre jours, à la demande d’un concurrent de la flotte, basé à Morne-à-l’Eau.

La « révolution » des mâts en lamellé-collé

« Depuis l’an dernier, la « Classe des canots saintois de voile traditionnelle de Guadeloupe », autorise, dans ses règles de jauge, les mâts en lamellé-collé », explique Alain Foy.

Avant, pour fabriquer des mâts, on coupait des arbres en forêt, ce qui était embêtant, parce que souvent, les bûcherons abattaient au moins huit arbres pour en trouver un bon. L’intérêt du lamellé-collé, c’est qu’au lieu d’avoir un seul arbre qui constitue le mât, tu peux le monter toi-même à partir de planches différentes, coupées en morceaux que tu colles. Tu peux ainsi donner la forme que tu veux au mât. C’est beaucoup plus solide, car il n’y a pas de tension, de courbe dans le vent.Alain Foy, charpentier marine, constructeur de canots saintois

« Cela a amélioré énormément la voile traditionnelle. Aujourd’hui, on voit clairement la différence entre les nouveaux canots équipés de ces mâts-là et les anciens. Le progrès continue ! », se réjouit le constructeur.

Alain Foy a testé dans un premier temps le lamellé-collé en utilisant du bois d’acajou blanc. « Léger, mais trop flexible ». Il fabrique aujourd’hui ses mâts à partir de pin commandé au Canada.

Réglage sur mesure

Si la hauteur (7,25m) et le diamètre du mât (11 cm minimum) sont réglementés, la jauge du canot saintois en revanche n’impose pas un poids minimum.

Certains des mâts que j’ai fabriqués pèsent 22 kg ; d’autres 18kg. Je mets toutes les planches dehors sur des tôles et c’est comme dans un four. Quand je vais utiliser le bois, ainsi étuvé, une planche qui pesait par exemple 8 kilos sera descendue à 5 kg !Alain Foy, charpentier marine

Et pas question pour Alain Foy, de livrer un mât sans l’avoir réglé lui-même sur le canot. « Souvent, les gens demandent un mât et l’installent n’importe comme dans le bateau, et ne comprennent pas pourquoi ça ne marche pas. Moi je fais jouer ma responsabilité en indiquant le réglage précis du mât : quelle quête, comment tirer dessus… ». Les clients venus de Guadeloupe doivent donc s’organiser pour acheminer leur canot jusqu’à Terre-de-Haut avant de prendre possession d’un nouveau mât.

5 nouveaux canots dans le Traditour

Même s’ils ont perdu du terrain ces deux dernières années au profit de ceux issus du chantier Forbin, les canots d’Alain Foy restent majoritaires dans la flotte du Traditour. Sur les 39 embarcations engagées cette année, 22 ont été fabriquées à Terre-de-Haut, soit une part de marché de 56,4%.

En 2025, le Saintois a construit cinq nouveaux canots, qui seront présents sur ce tour de l’archipel. Certains se sont déjà fait remarquer pendant la saison, comme « Captain Nautic », barré par Fabien Delporte, qui a remporté en mai le championnat de Guadeloupe. Autre représentant des nouvelles créations Foy : Philippe Fiston, sur « Black Sab Les Sablières ». Le tout dernier canot sorti du chantier naval saintois est celui de l’équipage mixte « Vil Tibou », mené par Andy Nelsom. Livré fin juin, il sera étrenné sur ce Traditour.

« La mer n’est pas carrelage… »

« C’est mon 61ème canot », s’exclame fièrement le constructeur.

J’ai commencé en 2002. Et sur les 61 canots, aucun ne se ressemble. Pour chaque nouvelle coque, je mets un petit plus, de vitesse… Moi ne ne navigue pas, je ne fais pas de compétition. Cela veut dire que je dois trouver comment régler les canots à point. Pour les derniers bateaux créés, les barreurs m’ont appelé en me disant que le réglage était incroyable : la barre est tellement douce et légère qu’ils ont l’impression de ne pas la tenir. Le canot marche tout seul ! Or, sur un canot traditionnel, dès que tu lâches la barre, il lofe. Le but pour moi, c’est de chercher cette précision-là.Alain Foy, charpentier marine

 Et pour Alain Foy, tout n’est pas uniquement technique.    

Dans la construction, il y a déjà l’amour de ce que tu vas faire. C’est très important, parce que ça reste humain. Les arbres, c’est du vivant. Il y a une énergie entre toi, l’arbre, les gens qui vont courir avec le canot… Et parfois cette union est parfaite… Il faut déjà le bon bois, qu’il ait bien séché… Et ensuite, moi quand je cherche une forme, je dois connaître le poids du barreur. Si la personne est trop lourde, il faut créer quelque chose pour que le canot ne s’asseye pas sur l’arrière. Je travaille aussi beaucoup sur le frottement : la façon dont le bateau va pénétrer une vague, parce que la mer n’est pas carrelage !Alain Foy, charpentier marine

Un métier menacé ?

Alain Foy est intarissable. Mais le poète de la construction nautique est amer. « Là où j’ai beaucoup de peine, c’est de voir qu’il n’y a pas de transmission. Il n’existe pas d’école de construction marine en Guadeloupe. Le métier de charpentier marine est en train de disparaître. Cela fait des années que je me bas pour cela, auprès des politiques, des centres de formation… sans résultat », déplore le constructeur, âgé de 60 ans, et qui avait lui-même appris du savoir-faire de son père.

Josiane Champion  • Publié le 2 juillet 2025 à 17h05, mis à jour le 3 juillet 2025 à 12h08

Régate voile traditionnelle à Terre-de-Haut -Photo Raymond Joyeux

Première étape ce vendredi 4 juillet : Dominique-Terre-de-Haut

Vainqueur : Steven FOY

Après l’arrivée aux SaintesPhoto mairie de Terre-de-Haut.

Publié par Raymond Joyeux,
le vendredi 4 juillet 2025

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